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Le Langage des Viscères #22 @Auditorium Saint-Germain, le 24 Janvier 2014


Si un jour vous êtes à Paris et que quelqu’un vous parle d’une soirée appelée Le Langage des  Viscères, surtout n’hésitez pas à lui demander s’il reste des places et si tel est le cas foncez !
Vous ne serez pas déçus !
Sous la direction artistique d’Amine Boucekkine, Le Langage des Viscères se définit comme une soirée artistique résolument alternative. Multidisciplinaire, tous les arts se rencontrent en l’espace d’une soirée.
Pour cette vingt-deuxième édition, Amine Boucekkine propose une exposition photos, réunissant pas moins de 16 artistes, autour de la thématique « Ceci est mon corps », des lectures de textes personnels de Pascale Bessard, d’Amine Boucekkine et Jérôme Attal poursuivra avec une lecture de Georges Bataille et L’Histoire de l’œil,  une performance d’Olivier De Sagazan intitulée L’Enfer-moi purement inspirée de l’œuvre de Beckett  L’Innommable, une création contemporaine L’Attente de Juliette Morel, en exclusivité une performance du danseur Butô Gyohei Zaitsu sur l’art vidéographique de Dorianne Wotton et une lecture d’Amine Boucekkine. Pour finir sur une compétence hors-norme des Von Magnet.

« Ceci est mon corps » est l’occasion de voyager dans un univers proche du body-art pour certains, steampunk pour d’autres. Des clichés nous interrogeant sur notre identité, la construction ou déconstruction de cette dernière. Les photos exposées font preuve d’intensité.
Les textes de Pascale Bessard et d’Amine Boucekkine nous perce au plus profond, ils sont clamés. Ces textes gothiques, d’une noirceur certaine nous prennent jusqu’aux entrailles. N’est-ce pas là tout l’art du Langage des Viscères ? S’en suivait la lecture d’un extrait de L’Histoire de l’œil par Jérôme Attal qui n’hésite pas à faire rire dès que l’occasion se présente.
Olivier De Sagazan  livre une performance hors norme (après la très connue Transfiguration). Tout l’esprit de Beckett réuni dans une scénographie incroyable. L’artiste est dans une roue et ne cesse de courir à l’intérieur. L’Enfer-moi  est un texte respectant les formalités de l’absurde avec le non-sens, les incohérences et les thèmes exploités : la solitude de l’homme et les plongées dans l’inconscient du personnage. Avec des sonorités stridentes, la performance est exceptionnelle.
L’Attente de Juliette Morel est un instant qui se savoure. Des mouvements paramétrés qui reflète une véritable pureté et élégance. Qui soudainement deviennent brusques pour mieux traduire la cruauté de l’attente.
Lors de cette vingt-deuxième édition, Amine Boucekkine est parvenu à présenter en exclusivité totale sa création avec Dorianne Wotton et Gyohei Zaitsu. Le danseur Butô aura touché son public par son interprétation  si violente mais émouvante. Sur une création vidéographique de Dorianne Wotton qui s’ancrerait presque dans l’univers du psychédélisme.
La soirée se clôture avec le groupe Von Magnet dans un univers musical indéfinissable tant il mélange les sonorités. Bousculant l’univers scénique, le collectif occupe l’espace avec tous les arts ; théâtre, danse et vidéos. Von Magnet sait provoquer le meilleur des émotions de l’être humain.

Je remercie donc mille et une fois Amine Boucekkine et toute son équipe pour leur capacité à transporter le public le temps d’une soirée !



La performance d'Olivier De Sagazan est visible ici !

Retrouvez également mes clichés par là !

Roméo & Juliette @Théâtre de la Porte Saint-Martin, le 22 Janvier 2014


Nicolas Briançon est toujours dans sa période élisabéthaine, plus précisément Shakespearienne. Après La nuit des rois et Le songe d’une nuit d’été, il décide d’adapter Roméo & Juliette d’après la nouvelle traduction de François Laroque et Jean-Pierre Vilquin. Briançon voulait une adaptation « prestigieuse et populaire ».
Il en ressortira surtout le côté populaire.
Dans une Italie des années cinquante, les deux amoureux nés sous la mauvaise étoile sont campés par deux jeunes acteurs tous deux révélés par l’écran; Niels Schneider et Ana Girardot. Schneider interprétera un Roméo fragile, aveuglé par son amour et quelque peu naïf. Pendant que Girardot offre une Juliette tantôt juvénile tantôt innocente. Ecrasée par un père autoritaire voire violent, incarné par Charles Clément.
Le couple aura des airs sensuels mais également immatures. Tous deux évoluent dans un décor fondé sur des murs mobiles. On déplorera sans doute l’absence du balcon pour la célèbre tirade « Ô Roméo, pourquoi es-tu Roméo ? » à la place ; un lit à roulettes. Roméo est dans le public et se colle à la scène, il est sous ce qui semblerait être la fenêtre !
Néanmoins, l’espace scénique est très large, les acteurs circulent beaucoup dans le public !
Si dans la pièce de Shakespeare on rit, chez Briançon aussi. Notamment grâce au duo Mercutio (Dimitri Storoge) - Benvolio (Cédric Zimmerlin) qui tire même la chansonnette au sujet de la nourrice de Juliette portée par une Valérie Mairesse très douce, aimante et généreuse. Porté par un très bon Bernard Malaka, Frère Laurent est ce personnage divisé, perdu, qui ne cherche qu’à faire le bien autour de lui.  En revanche, il y a bien un personnage qui retient l’attention particulière du public de par son absurdité : l’apothicaire ! Oui, ce dernier n’est autre qu’un… clown !
Toutefois, la scène finale se fait intimiste et très charmante : des bougies sont alignées tout au long de l’estrade. Le tombeau est parsemé de pétales de rose.
Malgré ce retour quelque peu mitigé, le spectacle respecte l’une des volontés chères à Nicolas Briançon : être populaire ! 



Einstein on the beach @Théâtre du Châtelet, le 12 Janvier 2014



Dimanche 12 Janvier 2014 au Théâtre du Châtelet, une masse de personnes attendaient billets en main pour assister à l’ultime représentation d’Einstein on the beach. Si trente-sept ans plus tôt à Avignon il n’avait pas attiré les foules, c’est désormais à Paris que le spectacle aura eu le succès mérité.
Brisant les codes de l’opéra classique qui obligent à avoir une trame narrative ou tout simplement des chanteurs jouant des rôles, Einstein on the beach  est un opéra exceptionnel et novateur.
Einstein on the beach c’est un réel voyage expérimental entre les sonorités redondantes tantôt indiennes, tantôt jazzy dirigées par Philip Glass qui considère lui-même ces sons comme des « thèmes et variations », les chants sont par moment numériques (le chœur chante des rythmes « 1, 2, 3, 4 – 1, 2, 3 ») tantôt le chœur récite des notes « do - si – do -  si »  et les chorégraphies paramétrées au millimètre de Lucinda Childs. Les chorégraphes se déplacent tels des ballerines dans leurs boîtes à musique, réalisant des mouvements purs et élégants. A noter qu’ils évoluent dans de somptueux décors signés Robert Wilson. Bien que la trame narrative soit aux abonnés absents, certains lieux reviennent : un tribunal, un train aussi bien dans le paysage qu’à l’intérieur. Et Einstein dans tout ça ? Il apparait partout ! Soit en portrait sur le décor soit dans l’orchestre en tant que violoniste. L’ensemble du spectacle met en scène son invention : la bombe atomique.
L’œuvre s’achève sur un magnifique jeu de lumières ; sur fond noir, les danseurs s’animent devant des panneaux lumineux tels des plans orthonormés.
Un savant mélange des arts : images, sons et sensations au service d'une œuvre contemporaine magistrale.



                                                
 Séance de rattrapage : ici 

 Je souhaite également remercier Christophe EsnaultAriane et Roger Burton.