© Christophe Raynaud de Lage |
Fracassante et surprenante entrée dans le répertoire de l'institution française que Sarah Kane. Blasted en version originale, première pièce de la jeune dramaturge disparue prématurément est une œuvre complexe qui a beaucoup choqué lors de sa première représentation dans les années 1990. Les décennies passent, la société change...
Simon Delétang (actuel directeur du Théâtre du Peuple - Maurice Pottecher) adapte Anéantis intelligemment. Il joue sur la violence invisible ; celle qui fait encore plus mal, celle qui ronge les spectateurs doucement mais sûrement. Si elle est invisible, elle n'est en revanche pas inaudible : la voix off - Sylvia Bergé - lit les didascalies. Spectateur, libre à toi d'imaginer le pire, ferme les yeux, laisse toi envahir. Anéantis devient un huis clos de l'horreur.
Le Studio de la Comédie Française devient une chambre d'hôtel luxueuse qui sombre dans un décor de guerre. Faute au climat extérieur, faute à l'irruption de ce soldat - campé par Loïc Corbery - affamé, à bout. Christian Gonon se retrouve propulsé dans le corps de Ian, cet homme violent qui ne fait pas désirer : son ton méprisant, ses insultes racistes, non rien n'inspire confiance en cet homme. Mais Cate - Elise Lhomeau - douce, ambigüe lui trouve quelque chose, elle cherchera encore de temps à autre mais c'est bien là. Le jeu est bon, l'effet opère tout en invitant à ce questionner sur ce choix d'invisibilisation de la violence : insidieuse ou véritablement efficace ?
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