Les Chiens de Navarre n'ont rien perdu de leur mordant. Aussi irrévérencieux, insolents qu'au dernier souvenir sur les écrans (Oranges sanguines), c'est non sans plaisir qu'on les retrouve pour un grand barnum pour célébrer la vie dans ce qu'elle a de plus cynique.
© Philippe Lebruman |
Les spectateurs prennent tranquillement place dans les gradins des Bouffes du Nord transformées en Assemblée Nationale éphémère. Les comédiens-députés s'invectivent dans tous les sens. Le débat porte sur la réforme des retraites (tiens donc...), âge légal de départ souhaité à... 72 ans ! Arguments démentiels et références improbables se croisent, noms d'oiseaux proférés dans tous les sens. Comment ne pas penser aux derniers débats de nos chers élus ?
Le rideau rouge s'ouvre sur l'élu RN envoyé dans un hôpital psychiatrique qui tombe en ruine. A peine arrivé, il balance toutes les pires horreurs lors de son entretien d'accueil. La jeune infirmière qui le reçoit finira par lui tirer une balle en pleine tête. S'enchaînent des saynètes symptomatiques de notre époque, à la rencontre de patients aux profils variés : une jeune femme passée par la case tentative de suicide après la disparition du chanteur Christophe, une quarantenaire désespérée de ne pas rencontrer l'homme de sa vie, un schizophrène en rencontre avec un homme politique visiblement en campagne qui le répètera à tout va que rien ne le dérange jusque dans le plus graveleux, un pré-retraité remercié par ses supérieurs jeunes startuppers qui circulent en hoverboard et qui s'expriment qu'avec des anglicismes managériaux... A l'image de la violence de notre société contemporaine, les joyeux comparses n'ont pas pu s'empêcher d'imaginer une scène de violence entre CRS et gilets jaunes. CRS en sous-effectif se retrouvent éborgnés ou perdent leurs mains voire... leurs têtes.
Toute la force des Chiens de Navarre c'est de n'avoir aucune limite avec l'humour, toujours plus outrancier, d'acérer toujours plus la plume et de faire grincer les dents. Pendant presque deux heures, le collectif fait voler en éclats l'époque, s'offre un gros délire marqué par des moments d'improvisation. C'est parfois sale mais c'est follement ravageur.
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