Les Renards pâles - Yannick Haenel


Je n’ai jamais lu les ouvrages de Yannick Haenel, c’est donc ma première lecture. Rentrée littéraire faisant contexte c’est l’occasion. Me laissant tenter par une histoire basée sur une insurrection, je ne regrette pas. J’y ai trouvé une écriture plutôt crue ce qui m’a peut-être faite vivre davantage dans le récit. On rencontre le personnage de Jean Deichel (apparemment ce n’est pas la première fois qu’on le trouve, il aurait déjà fait son apparition dans le roman Cercle), un homme qui a décidé de vivre dans sa voiture. Il l’a décidé après avoir été exclu de son logement. Cet homme bouleverse un peu les codes sociaux ; il refuse de voter et de travailler. C’est en quelque sorte refuser la soumission. Sa vie se résume donc à des errances dans Paris et des soirées bien arrosées entre amis. Pendant ses vagabondages il est confronté à un étrange grafiti ; « La société n’existe pas ». Pour cet homme qui s’est exclu du monde, cette phrase prend sens, en dessous il trouve le signe du Renard pâle ; un dieu qui est né au cœur de la destruction, la divinité anarchiste tout droit venue d’Afrique. Lui vient alors une sorte d’illumination ; rejoindre la révolution. Deux de ses amis sans-papiers trouvent la mort, il se sent d’autant plus concerné par ce bouleversement. 
Le choix du pronom « Je » initial transformé en « Nous » par la suite m’apparait comme plutôt judicieux. Cette solitude qui devient une communauté ; plusieurs « Je » qui se sentaient seuls deviennent « Nous » qui ne sommes pas seuls mais ne formons qu’un. Une révolution ne peut être individualiste. On pense alors au mouvement Anonymous, un rassemblement d’anonymes, unis pour la même cause.
Révolution remarquable que celle de ces canidés, elle brise le cliché d’une révolte violente, ils veulent bouleverser l’ordre établi en empêchant les arrestations de familles de sans-papiers. 
J’ai donc apprécié ce roman, lu dans les transports et parfois je me posais aux endroits dont Jean Deichel fait mention pour pouvoir mieux ressentir cette insurrection naissante. La révolte gronde quelque part dans Paris… Ouvrez l’œil ! 


La société des loisirs @Petit Théâtre de Paris, le 02 Octobre 2013

Le décor est planté : un canapé, une table basse, une chaise et une lampe sûrement sortis tout droit d’IKEA. Marie (Cristiana Reali) et Marc (Philippe Caroit) forment un couple heureux, ils possèdent une belle maison, piano à queue dont ils ne se servent pas puisqu’ils ne savent pas jouer mais l’utilisent comme cachette, une baie vitrée qui donne sur une terrasse avec piscine, une belle situation, un petit garçon qui aura sûrement une petite sœur. Petite sœur issue de l’adoption, elle sera chinoise. Chinoise ? Oui ces enfants sont des petits prodiges en musique, il faut bien que quelqu’un utilise le piano dans cette maison ! Et à part tout ça, il se dégage tout de même une énorme frustration. Cette frustration, ils en discutent en attendant leur ami Antoine (Stéphane Guillon) dont ils envisagent de se séparer. Ce dernier est fraîchement divorcé mais mène une vie de débauché avec multiples compagnes ou « amies de cul », extasie, alcool et autres. Lorsqu’il arrive, il est accompagné d’Anne (Lison Pennec), 21 ans et franche comme les gens de son âge. Tout ce petit monde se retrouve donc dans la maison pour parler de cette séparation. Antoine sera donc l’ami qui fera éclater au grand jour les frustrations de ce couple. On trouvera une Cristiana Reali très à l’aise dans ce rôle de femme à deux faces : douce et coriace à la fois. Après quelques verres, elle dévoile l’envie d’être une femme qui se laisse aller à des aventures. Philippe Caroit joue habilement le mari si peu courageux, cliché du parfait « bobo ». Et dans le couple libre, Stéphane Guillon en bon politiquement incorrect qu’on connait, cynique à souhait et la jeune prometteuse Lison Pennec dans la fraîcheur de vivre, le franc parlé des jeunes gens du bel âge. Comédie grinçante qui décrit la réalité d’une société en manque de réel bonheur. 


Au Petit Théâtre de Paris du 17 Septembre 2013 au 27 Octobre 2013