2 666 @Théâtre de l'Odéon - Ateliers Berthier, le 11 Septembre 2016




Comment procéder à une chronique en peu de temps après avoir vu le spectacle fleuve du jeune Julien Gosselin ? Essayer de décanter au maximum, distiller les parties, se remémorer sans frémir…

2666  © Simon Gosselin 
2 666 avant d’être adapté au théâtre est le dernier roman inachevé du chilien Roberto Bolaño. Initialement, l’œuvre d’un peu plus de mille pages au compteur devait être divisée en cinq tomes respectant les cinq parties du roman. De ce qu’on raconte, Bolaño demanda à ce que le rythme soit d’un tome par an afin d'assurer un revenu à ses enfants après sa disparition. Cette volonté ne sera visiblement pas respectée.

Un peu plus d’onze heures. C’est ce qu’il aura fallu au jeune metteur en scène pour parvenir à proposer un spectacle à l’image du roman. Raconter une histoire unique serait complexe, les cinq récits pourraient fonctionner en toute autonomie. Mais, deux éléments rappellent qu’ils sont étroitement liés : un auteur qui suscite la fascination de quatre universitaires répondant au nom de Benno von Archimboldi et une ville au Mexique ; Santa Teresa où depuis plusieurs années sont commis des meurtres de femmes sans que la police locale ne puisse avancer dans ses enquêtes.

Toute la puissance de la pièce se situe dans le plus qu’habile mélange de la scénographie et de la réécriture du texte d’origine. Entre images en temps réel empreintes d’une véritable poésie, l’horreur et la violence parviennent à s’installer pour mettre en place une atmosphère perturbante, le tout dans un espace constamment en mouvement et une musique alternant entre électro lourde et morceaux presque planants.Tout se joue sur la profondeur de la scène en articulant trois cubes transparents d’une hauteur imposante. Gosselin tend à mélanger trois arts magistraux : le cinéma, le théâtre et la performance. 

Dans cette volonté de jouer sur la pénibilité, la frustration, l’infini, Gosselin parvient à mettre en scène une pièce monstrueusement bouleversante – le spectateur gardera à l’esprit l’éprouvante avant-dernière partie dite « La partie des crimes » où sur l’écran centrale défilent les différents récits des meurtres de Santa Teresa sur un fond sonore angoissant -.


On saluera la performance des jeunes comédiens de la compagnie Si vous pouviez lécher mon cœur non seulement parce qu’ils tiennent la cadence, mais aussi parce qu’ils sont intensément bons, porteurs d’une énergie plus que nécessaire.  

 2666  © Simon Gosselin 

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