Il faut toujours un peu de temps pour se remettre d'un spectacle de Julien Gosselin. Il est vrai que pour Extinction, on a peut-être exagéré un peu pour revenir sur le spectacle mais voilà. Les mots sont désormais posés. Retrouver les murs du Théâtre de la Ville pour un grand spectacle, c'est chose faite.
© Simon Gosselin |
Après avoir osé un spectacle où les répliques se lisent en autotune, le jeune metteur en scène et sa compagnie nous embarquent au milieu des acteurs à même le plateau. La foule d'aventuriers spectateurs est sur le plateau, s'ambiance sur fond de musique techno noire très organique - la voix de l'incontournable Victoria Quesnel -. Pour ceux restés dans les traditionnels fauteuils, projection des danseurs-figurants à l'écran avec pour seule énigmatique légende "Roma Décembre 1983" après Extinction. Les comédiennes Rosa Lembeck et Victoria Quesnel se chercheront à travers la foule et échangeront quelques répliques.
De figurants-acteurs, ils seront renvoyés à leur statut premier de spectateurs pour la deuxième partie, plus massive, plus dense. Le plateau est désormais une maison mais le nordiste conserve à nouveau le mystère en ne laissant rien de visible. On ne verra que la façade. L'intérieur se dévoile sur les écrans dans des images en noir et blanc. La scène ne se déroule plus à Rome, mais à Vienne. Nous ne sommes plus en 1983 mais en 1910. On parle culture, peinture et littérature dans le salon pendant que d'autres s'adonnent à la luxure. Ce petit monde extravagant, masqué se livre doucement à la création d'un régime fasciste. Un poison qui affecte lentement mais massivement. C'est le temps de l'apocalypse joyeuse. C'est ce qui fait la beauté saisissante de ce spectacle. Le noir et l'or ont toujours fait bon ménage - n'y voyez pas une allusion au volume de Tintin au pays de l'or noir, il n'en est rien -. Gosselin et sa bande (Guillaume Bachelé, Joseph Drouet, Denis Eyriey, Carine Goron, Victoria Quesnel et Maxence Vandevelde) associée à la Volksbühne de Berlin (Rosa Lembeck, Marie Rosa Tietjen, Max Von Mechown et Zarah Kofler) font un incroyable travail d'adaptation pour que l'on assiste à un grand moment de théâtre. La mise en abyme du théâtre dans le théâtre est une fois encore remarquable. On est toujours admiratifs des images des caméramen toujours au plus près des personnages, de leurs émotions.
Cette deuxième partie s'achève sur un jeu de massacre réel. La fin, la vraie Extinction c'est celle qui sera interprétée par Rosa Lembeck qui s'empare des mots de Thomas Bernhard et nous embarque avec elle. Au-delà de la petite cinquantaine de personnes réunies - à nouveau spectacteurs - autour d'elle dans sa conférence, c'est la foule de spectateurs. Adresse à l'humanité toute entière. Rappelons nous du passé, pour mieux bâtir demain.
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