Vincent Macaigne... Après avoir proposé une relecture d'Hamlet - Au moins j'aurais laissé un beau cadavre - à l'occasion de l'édition 2011 du Festival d'Avignon, il a délaissé les planches pour le cinéma.
En 2009, il proposait déjà son adaptation du célèbre roman de Fedor Dostoïevski mais c'est véritablement en 2014 qu'il revient de plus belle pour Idiot ! Parce que nous aurions dû nous aimer pour le Festival d'Automne au Théâtre de la Ville puis au Théâtre des Amandiers.
C'est dans une ambiance festive que se déroule l'arrivée au théâtre. Distribution de boules quies à l'entrée, ça s'annonce bruyant et on circule dans une brume blanche digne des grandes soirées.
Mégaphone à la main c'est le père de Nastassia Philippovna (Servane Ducorps)qui nous convie à célébrer l'anniversaire de sa fille. Une immense farandole est orchestrée jusqu'à l'arrivée dans la grande salle. Et dans la grande salle ça se poursuit. Il fait noir, on distingue à peine les rangées, on se laisse tenter à l'idée de rester debout puis on finit par s'asseoir.
Les premières tirades sont clamées voire vociférées au travers de micro ou à nouveau de mégaphone. Lebedev nu (Emmanuel Matte) débarque sur la scène qui enfile un costume d'énorme lapin - pensant que c'était une soirée déguisée - et débite un discours sur les idéologies; libéralisme, socialisme ou encore capitalisme. C'est ambiance soirée mousse dans une pièce aux vitres en plexiglas où tout le monde s'agite, le champagne coule à flot, les coups partent dans tous les sens.
L'image d'une société décadente qui n'est autre que la nôtre. Violence et débauche sont les maîtres mots de cette adaptation reflet d'une époque bouleversée.
Le décor est immense et ne cesse de se déconstruire. "Voici venu le temps du sang et de l'argent" peut-on lire sur les murs. Fumigènes, terre, peinture, mousse, eau, hémoglobine, acier se déversent sur un plateau en plein démantèlement.
Dans cette relecture, Pascal Reneric interprète un Idiot tantôt grotesque, candide dans le premier acte. Devenu grave et désillusionné dans le second où il subit l'humiliation. Servane Ducorps livre une Nastassia frappée par les débordements, s'imagine dépravée, souillée - notamment lors d'une scène très crue - . Thibault Lacroix incarne un Hippolyte qui peine à réussir sa mort, après une vie basée sur le mensonge, personnage déboussolé, profiteur, les prestations de Dan Artus (également assistant metteur en scène du spectacle), Pauline Lorillard, Rodolphe Poulain et Thomas Rathier (qui signe la partie vidéo) sont tout aussi remarquables.
Vincent Macaigne croise nos pulsions, nos passions, nos colères et nos espoirs.
Il signe ici un manifeste sur la déconfiture de notre société de cyniques, cupides, individualistes et hypocrites.
"On ne finira jamais la liste des saletés de notre siècle"
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