Abnégation @Monfort Théâtre, le 25 Septembre 2020



L'ambiance est obscure. Une table centrale est recouverte d'une toile plastifiée blanche, l'éclairage aux néons blafards ne rassure pas, le plateau est clôturé de paysages en noir et blanc sur de grands panneaux qui font office de fenêtres. Quelque chose de pas net s'est sûrement passé. Deux hommes dans un état second discutent. Il ne serait pas surprenant de retrouver des cadavres dans les alentours. Et nous entrons dans la matière, nous pénétrons dans les bas-fonds. Sans jamais tout se dire, ce sont sur la base de non-dits que les personnages révèlent leurs travers les plus vicieux, les rendant monstrueux. Et quand ils sont isolés, un semblant d'humanité revient. 

Le metteur en scène Guillaume Durieux a fait appel au scénographe François Gauthier-Lafay pour recréer une ambiance pesante, stressante, tendue dans la cabane du Monfort. Et les comédiens sont tous (des) puissants. A commencer par Eric Caruso qui parvient à faire de Paolo un véritable parrain, droit suivi de près par Alain Fromager qui incarne un José particulièrement intimidant. Mais le clan ne se limite pas qu'à deux hommes. Thomas Gonzalez endosse le rôle de José, communicant cocaïné, pris au piège de ses supérieurs. Cette organisation presque mafieuse, piétine l'un des siens : Stanislas Stanic qui porte sur ses épaules le rôle de Celsio. Ce dernier conseiller qui incarne l'abnégation, sans nulle autre alternative. Vous pensiez qu'aucune femme ne trouverait sa place ? Florence Janas brille de par la complexité de son personnage - Flavia - prise au piège, tiraillée par ses volontés et ses intérêts. Guillaume Durieux et son quintet nous tiennent en haleine de bout en bout, la peur parfois nous habite - la sortie inattendue d'une arme en toute fin double la tension, on ne la quitte presque plus des yeux - comme on aime la ressentir au théâtre. 

Abnégation n'est que le premier volet d'une trilogie politique que signe le brésilien Alexandre Del Fara, témoignage de la conjoncture politique et sociale de son pays. Si l'utilisation de musiques folkloriques et les noms des personnages rappellent le cadre, la tension créée semble si proche de nous. Les petites magouilles ne sont pas propres à un pays. Elles existent partout. 


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire