Un ennemi du peuple @Théâtre de Belleville, le 17 Septembre 2020

 

© Vincent Fillon

Interpréter Un ennemi du peuple après que le duo Nicolas Bouchaud / Jean-François Sivadier ait dynamité le Théâtre de l'Odéon (souvenir) était un défi de taille auquel il faudra ajouter le fait d'être programmé en période de crise sanitaire universelle. Guillaume Gras et sa bande n'ont pas manqué de courage.  

Nous voilà plongés dans un dispositif quadri frontal. Guillaume Gras tire son épingle du jeu en offrant une adaptation résolument plus courte, condensée du texte d'Ibsen. Et cette version ramassée s'avère efficace. Peut-être parce qu'il en reste l'essence pure. Dans une économie de moyens, les comédiens sont démasqués - justement parce qu'ils sont les seuls à ne pas porter de masques ? - assis parmi les spectateurs, devenus juges d'un tribunal sur plateau. Les répliques fusent une fois qu'ils se positionnent debout au milieu du plateau puis les actions s'enchaînent dans un rythme soutenu. Pas ou peu d'éléments de décor, une table côté cour garnie d'une carafe. Rien de plus.  

Le comédien central Nicolas Perrochet campe un Thomas Stockman volcanique, convaincant suivi de près par Gonzague Van Bervesselès en frère féroce dans son cynisme. Il ne faut pour autant pas oublier Ivan Cori en impeccable représentant digne de la fameuse "majorité compacte", Marie Guignard en épouse aimante, Eurialle Livaudais en journaliste corrompue et Bruno Ouzeau en beau-père soucieux de ses petits intérêts particuliers. 

A l'heure de l'épidémie et des nombreuses informations contradictoires, aux mensonges, le texte du dramaturge norvégien ainsi raccourci prend une résonnance encore plus contemporaine et nous rappelle fortement la célèbre phrase de son contemporain britannique George Orwell "A une époque de supercherie universelle, dire la vérité est un acte révolutionnaire". 

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