"Les officiers de police judiciaire et, sur l'ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux articles 20 et 21-1° peuvent inviter à justifier, par tout moyen, de son identité toute personne à l'égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner :
Article 78.2
Code de procédure pénale
© Léa Neuville |
78.2 est une pièce qui prend son point de départ sur l'article du code de procédure pénale sus-cité mais qui élargit le débat sur l'institution, l'exercice du maintien de l'ordre établi et le respect des lois. Et c'est une franche belle réussite. Que ça soit le texte, l'interprétation ou plus simplement l'ambiance générale, tout est cohérent. Loin d'imposer un point de vue caricatural qui basculerait dans une charge simpliste contre la profession, Bryan Polach et sa compagnie Alaska proposent une pièce qui arrive à apporter la légèreté et le recul suffisant sur ce sujet peu aisé.
La pièce démarre dans une soirée entre amis comme il en existe tant. Tout ce petit monde est enjoué, légèrement enivré. Thom (Thomas Badinot) s'entiche de Yasmine (Juliette Navis). A l'entendre parler, Thom semble complètement saoul mais il n'en est rien. C'est un ancien policier qui présente des séquelles neurologiques suite à un incident dont le souvenir n'est pas si clair pour lui. Le fond de l'affaire est bien plus complexe. Les deux autres amis de Thom - Émilie Chertier et Laurent Evuort-Orlandi - commencent à s'interroger sur l'identité de Yasmine. Elle tient un discours sur la sécurité qui est loin de les laisser indifférents. Elle prend la défense de l'institution policière en évoquant les territoires abandonnés. Eux répondent en parlant discriminations permanentes, violence non négligeable d'une partie des forces de l'ordre, l'influence de l'Histoire et la face sombre de la colonisation. La conversation se prolonge dans un ton plus mesuré.
Le quatuor évolue dans une scénographie est minimaliste : un tapis central en forme de rond - métaphore d'une arène dans lesquels s'affronteraient les deux parties irréconciliables -, un téléphone filaire au loin et des chaises. C'est dans ce décor épuré qu'une scène nous frappe par sa beauté : le quatuor de comédiens qui courent mais les mouvements sont comme une danse autour du rond sur un fond musical de Vivaldi. Flics, accusés, familles, victimes, toutes les parties prenantes sont représentées et toutes portent en elles un drame. Polach parvient à transposer les thèmes sans surcharger la gravité, il parsème les propos avec un humour parfaitement dosé.
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